mardi 9 octobre 2012

OPUS 17 - Les Piles Sont Fanées

"Fais Chier" était un de ses principaux Leitmotivs, avec MERDE, et d'autres invitations à voir comment rien ne pouvait réellement valoir le coup, rien du tout, aussi accompagnait elle sa suprême existence de criées incessantes et générale sur les autres, agrémenté de plaintes non exhaustives au quotidien, qu'il s'agisse du temps, de la pluie ou du dernier prix Nobel. Tous le monde l'était, les hommes comme les femmes.

Elle n'aimait pas manger à heure fixe : c'était trop. Avant 20 heures tout extra était exclu : il ne fallait point manger à 19 heures comme de stupides moutons, la soirée ne devait pas démarrer avant 21 heures 30 à minima, sauf lorsqu'elle oubliais encore pendant quelques heures au point d'avoir les crocs de croc o, dès  lors venait le moment ou elle disait, 'je crève la dalle', bordel, il n'y a rien à bouffer ? Elle attendait l'intervention divine et interrogeait toujours son athéisme d'une allocution plaintive et exercée sur l'Éternel incapable : Mein Gott ! En français  : Moooooon DIEU = avec en prime un regard affecté se hissant vers le ciel et qui à nul autre pareil ne pouvait rien faire d'autre que glisser sur les choses, la vie, et bien sûr sans utilité possible pour sa propre vie, au dessus et en deçà de DIEU, au point que parmi ses injures, figurait essentiellement l'invocation à l'être suprême, ultime recours face aux voies sans issues.

Pour se nourrir, elle avalait donc n'importe quoi à la va vite, debout, en regardant le ciel ou en jetant un œil sur tout ce qu'elle ne pouvait agir à ce moment là et qui lui perturbait le repas.  Debout devant une assiette, affamée, elle se saisissait de la nourriture à deux mains, sans prendre le temps de s'assoir ou de prendre des couverts, elle avait trop attendu. Avant de sortir, elle fumait, s'asseyait sur le bord d'un quelconque reposoir, et disait, j'en ai marre, fais chier.  

Elle attendait ensuite, après avoir avalé un café qui ne passerait pas mais dont elle ne se passerait jamais, passerait une ou deux fois vérifier ce qui se passait dans l'appartement, retournait dans son lit, fumait une première cigarette. Puis elle l'écrasait. Tout en l'écrasant, elle se sentait acculée, vide et sans forces, et ne l'aurait partagé en aucun cas. Elle prenait ensuite une glace et se regardait quelque temps, trop longtemps, et maintenant, une bonne heure était déjà passée. Alors elle se laissait envahir par une grande lassitude, elle voyait bien comme dans ses yeux les larmes restaient sèches, car elle n'était pas du genre à se mouiller, et malgré tout ce qu'elle endurait, elle était forte, elle. 

L'atmosphère était empreinte de tristesse et les volutes de fumée conservaient l'essence de la tristesse  au cœur : une grande fatigue la saisissait dont elle préférait faire porter la responsabilité aux autres. Ceux qui ne comprenaient pas, ceux qui avaient pensé contre elle, ceux qui se croyaient, ceux qui se pensaient meilleurs que, ceux qui ne la voyaient pas ainsi que ses proches. Ils lui faisaient endurer cela, ils étaient LA FAUTE. L'A-CAUSE D'EUX.

Elle trouvait trop con de porter des petites robes à fleur, mais aimait à se maquiller, et portait le Numéro 5 divinement enchâssé dans les volutes de fumées qui classait son aura parmi les prouesses olfactives de l'amour sensuel. 

Rouge à Lèvres, Long pantalons et BASTA.

Presque tous les hommes étaient des connards et elle ne voyait en l'autre que peu d'intérêt, séduite par la grandeur et à des hauteurs que peu de gens atteignent, elle ne se sentait que rarement en adéquation avec qui que ce soit car pour pouvoir s'accrocher à une conversation qui l'intéresse. 

Médium, elle voyait immédiatement ce qui clochait et au premier coup d'œil le couperet était tombé . Parfois en ayant même pas rencontré la personne dont elle entendait parler. Peu de gens entraient dans ses grâces, et il fallait un certain mélange pour que l'intérêt ou l'affection puisse refléter une partie de sa sagesse et de son attraction pour l'autre voire d'une quelconque approbation de votre vie sur terre. 

Une fois élu, vous l'étiez à vie, et quelque soit ses considérations, ses chagrins, ses colères, elle vous aimerait pour toujours et férocement. Et elle vous défendrait comme une tigresse dont on attaque les petits si jamais vous attentiez à ses proches qu'il fussent lointain en son cœur ou pas, pour peu que vous y soyez entré. En attendant, elle vous dépeçait de sa vue perçante et vous envoyait des prédictions néfastes et autoritaires sur ce qui lui déplaisait. Elle était du genre à monter sur ses  grands chevaux pour tout, ce qui lui permettait de fuir l'échange et la communication et de zapper pour quelque chose que vous ne pourriez pas comprendre car vous étiez trop con, trop faible, trop idiot et enfin tellement nul. Le pire c'est qu'en général, elle vous pliait en 1000 avec quelque grande justesse, le cœur à peine entrouvert, celui-ci enfermé dans quelques gouttes de pluie que personne n'avait essayé de comprendre, personne ou presque, et bien sûr, elle le savait car elle savait tout, et à l'avance, ce qui lui flanquait immanquablement l'cafard.  

- Et Merde, disait-elle, en faisant tomber du sucre, en lâchant le café par terre, en regardant la couleur du ciel, en lisant l'addition d'un restaurant ( cela fait quand même tant disait-elle avec un hochement de tête entendu, les lèvres plissées, glissant vers le pincement de la mâchoire côté droit, sous entendu "ils ne m'ont pas loupée"). Et aussi : pour répondre au téléphone, pour mettre un verre sur la table, après réception des impôts, à l'attention du démarchage téléphonique, des voisins, de la famille et des amis. Elle préférait toujours invoquer Dieu devant ce que la vie mettait devant elle, ainsi que le fait que plus rien ne valait le coup. 

A 40 ans, elle disait et pensait, je suis foutue maintenant. De toutes façons. C'est trop tard. Cela ne sert à rien. Pourquoi faire. Cela ne sert à rien. C'est fichu. Depuis qu'elle s'était persuadée de cela, elle avait pris sur elle pour se contenter du minimum, d'une vie sans amour, réchauffée par des douches brûlantes qui lui laissait des plaques roses sur la peau. Elle terminait ce rituel par une douche qu'elle disait froide qui n'atteignait que 20 degrés, et perçu comme semblable à des jets d'eau glacés après les brulures de l'eau chaude.

Merde fait chier disait-elle en entrant dans la salle de bain : 
- Fais chier, il n'y a encore plus d'eau chaude ? interrogeait-elle en attendant une réponse venue d'ailleurs.

Elle était friande d'œufs au plat, le matin, mais pas avec du jambon, dont elle se détournait toujours, au contraire d'un café noir d'ébène dont elle ne pouvait se passser pour émerger des limbes existentielles. Avidement, le chocolat et la pâte d'amande rencontrait son absolution éternelle et vous étiez proche du sain sacrement si vous la contentiez avec ce type d'attention, encore fallait-il que vous soyez tombé sur le goût qu'il fallusse pour entrevoir une once de reconnaissance. Quoiqu'il en soit elle mangerait tout et en vitesse, quoique parfois elle arrivait à faire durer gentiment l'attente si jamais elle avait un bouquin sur le grill qui vaille la paine de tout oublier autour de soi. Si jamais elle partageait un morceau de pâte d'amande avec elle vous deviez alors montrer patte blanche et vous délecter sans pour autant en faire tout un plat, et enfin faire montre de l'attention qui vous était faite, mais sans exagérer non plus, sinon, elle vous trouverait branque. 

Puis elle vous tournait l'dos, telle une féline noire et fière qui portait la langueur comme la meilleure de toute les petites robes noires dont chacune des femmes bas de gamme pouvait avoir envie afin de parfaire à l'avance les attentions qui pourraient leur être portées par la gente masculine.

Elle regardait la gente féminine avec appréhension, cependant qu'elle avait trouvé Toni Morison aimable et digne de reconnaissance absolue mais se gaussait des Katherine Pancol, lesquels livres, si elle vous voyait avec un de ces titres dans les mains l'invitai à vous balancer que faire le distingo entre la culture et la connerie n'était pas donné à toutes. Et que visiblement vous aviez choisi le trou noir au point qu'elle vous indique quand même que la vie étant courte mieux ne valait pas se faire chier avec de telles inepties.

Le masculin la faisait se marrer. Mis à par évidement quelques phénomènes, Hessel, dont on a pas besoin de citer le prénom pour savoir de qui on parle sinon ce serait être totalement taré ( tandis que  Le Vieil Homme m'indigne n'avait pour elle aucun sens, elle l'avait pourtant et lu puis refermé en se disant que c'était un fatras de conneries invalidantes), Kant, et Hegel, évidement, et dernièrement, ces dernières années, Michel Onfray avait rencontré son vif intérêt, Elle avait donc dévoré l'intégralité de ses œuvres, tout en flirtant avec une montagne d'autre choses. Pour enfin, l'abandonner à son sort car il l'avait essoufflée.

Pour ne parler que du meilleur, et encore, si elle daignait avoir envie de le dire, car vous n'aviez qu'à vous démerder tout seul : la curiosité étant une gageure de réussite sociale et personnelle,  (et non la largeur de votre four à micro-onde pour ne pas parler  de la montagne de vos acquisitions matérielles susceptibles de refléter votre égo comme une bagnole de Naze même si elle les aimait beaucoup) Elle avait trouvé ZULU 'très bon mais très dur', soit admettre la légitimité d'une écriture que tout les autres soit disant écrivains n'aurait jamais pu avoir, car disait-elle en riant, Il ne suffit pas d'écrire pour être écrivain, alors fais gaffe à ce que tu Lis.


Ces derniers jours, elle batifolait avec La Muraille de Lave qui avait indignement succédé à elle ne se rappelait plus quoi (page 174 "- J'ai cru que tu allais réussir à enterrer cette histoire. Ensuite, une fois que tout serait terminé, je prévoyais de te dire la vérité. Que tu le crois ou non, c'est ce que j'avais prévu"). Il fallait bien digérer Odon Vallet, Dieu et les religions en 101 questions réponses , Albin Michel : Page 12 :"  Les religions sont toutes des créations humaines, mais la foi ? Dieu à crée les hommes ..." commenté de : " Ah ! Bon ?"

Puis, Page 13, commentée de  : 
- "La Foi est une réaction psychologique à l'angoisse."

Tout cela Précédé de Franz et François (François Weytergans) : JE ne connais rien de plus versatile et capricieux qu'un livre que je commence à écrire mais surtout de 
Karl Marx, 
Histoire de sa vie 
Franz Mehring 
Omnia, Page 75 / "Il est mauvais d'accomplir un travail dans la servitude, fût-ce pour la cause de la liberté, et de lutter à coup d'épingles au lieu de combattre à coups de crosses. J'en ai assez de l'hypocrisie, de la sottise, de l'autorité brutale, j'en ai assez de notre docilité, de nos dérobades et de nos courbettes, j'en ai assez de jouer sur les mots. Je ne peux plus rien entreprendre en Allemagne, on s'y falsifie soi-même."

Et encore de Karl Marx BIOGRAPHIE INATTENDUE, Calmann-Lévy : 
Commentaire page gardée :
"En couverture : K.M et sa fille ainée Jenny ( et non sa femme ! comme indiqué en 4éme de couv.)"

Et  LXVII :
"Si au lieu de récolter le blé chez nous (...) nous découvrons un nouveau marché ou nous puissions nous procurer des objets à meilleur compte; dans ce cas les salaires doivent baisser et les profits s'accroitre. (...) La baisse des produits de l'agriculture (...) réduit les salaires non seulement des ouvriers employés à la culture de la terre, mais encore de tous ceux qui travaillent aux manufactures ou qui sont employés au commerce." 
Page 146, 
kARL mARX OEUVRES 
Économie 
BIBLIOTHÈQUE DE LA PLÉIADE 
NRF
(cf, Le Monde du 24 avril 1990 ' l'effondrement du Marxisme Léninisme, Cornélius Castoriadis).
Pour finir, Vous seriez totalement crétin d'avoir raté Conrad au point qu'elle vous l'aurait volontiers offert et presque même donné un des siens, admettons, Typhon. Lorsque le prénom sautait, l'Auteur était entré à l'Académie Des Merveilles.

Elle aurait regardé Claro avec montre suspicion bien qu'elle eût pu partager un sens de l'humour trop proche à son goût et bien sûr trop masculin, elle aurait sans doute apprécié quelque peu l'auteur si elle n'avait déjà vu et tranché dans le vif (enfin c'est ce qu'on aurait pu croire) tout esprit trop ambitieux qu'elle révoquait immédiatement au rang des nuisibles sur ses étagères croulantes de poussière qui ployaient sous ses engouements passés et immédiats. (Mis à part et entre parenthèses  Alexandra David-Neel) et bien évidement les multiples récepteurs radio universels incapables de franchir le mur du Son depuis toujours (obligée de se taper la frappante France info et même heureuse de pouvoir enfin entendre quelques nouvelles du front sur l'ordinateur qui s'éteignait tout seul au bout de 10 minutes de joie ultime) elle finissait immanquablement par rembobiner la pellicule des plaintes en boucle contre l'humanité, car elle trouvait qu'elle n'avait vraiment pas de pot :

"J'ai Toujours Tous Les Pots" assenait- elle ensuite en un slogan publicitaire.


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