mercredi 29 avril 2015

Sans Plus Rien Percevoir

Un amas gluant épousait le bitume dans une marée flaque, rouge et une matière informe à laquelle était relié le crâne d'un individu, quelques personnes parsemaient le littoral de ce dimanche devant le restaurant ça et là : il ne pleuvait pas, l'ambiance était lourde et plombée par une douce fraîcheur arrosée d'un ciel bleuté entaché de sang qui avait giclé partout autour d'un règlement de compte et que cette belle journée venait saluer presque innocemment, dans un espace réduit de confidences intimes seulement accessible aux plus concernés, un  homme ramassait les débris, elle passa la porte d'entrée entourmurée de pierre blanches et dorées, passa encore le seuil en retenant son souffle, sans comprendre, regarda les tables dressées ça et là, sans avoir eu le temps de réaliser quel était le corps qui gisait dehors, traversa le restaurant alla au fond de l'espace disponible puisqu'il était désormais séparé par les recherches de la sensitive équipe de police scientifique déléguée à l'investigation, perçu le regard de ce bel homme qu'elle aimait bien, le visage surpris, écrasé et ouvert en même temps, la regardant sans sourire dans sa chemise blanche, débraillé comme un loup qu'on aurait tiré à l'envie, à la carabine, et au petit matin devant toute sa portée, cherchant dans quelle langue elle pourrait parler, ne trouvant pas, ne prononçant aucun mot, quelque chose d'italien lui venait mais elle ne savait pas dans quel pays elle se trouvait, ni dans quelle langue elle pouvait parler pour être comprise, comme si elle avait déjà eu l'habitude de ne plus pouvoir émettre un son, affublée d'une robe blanche dont elle n'avait pas l'habitude, que quelqu'un lui aurait enfilée comme sans la prévenir et par surprise et que maintenant elle serait une femme de ce type, inconnu, fine et légère dans ces déplacements, seule et perdue dans un corps ce qui ne correspondait plus à son corps réel, un petit de 2 ans traînant à ses basques sans comprendre ce qui se passait dont elle ne lâchait pas la main, dialoguant avec lui uniquement du regard, personne d'autre ne la vit passer, elle alla se changer se tenant presque comme chaque midi, prête à tout donner, mais errant sans savoir quoi faire, sans savoir même ce qu'elle pouvait bien faire habituellement dans ces lieux, elle se rendit compte qu'elle découvrait ce qui semblait être un restaurant avec plusieurs pièces les unes derrière les autres, au fur et à mesure que quelque chose de familier coïncidait avec un inusuel, que le jeune homme blond la connaisse bien l'intrigua, ne sachant plus aucunement qui elle pouvait être, ni comment lui ou elle même pouvait s'appeler, dans quelle ville ils étaient, dans quel métier, et avec quel liens dans ces lieux devenus le parvis familier d'un scène de crime, une fusillade qui avait emporté plusieurs d'entre eux,  eux dont elle soupçonna faire partie comme quelqu'un de connu et respecté mais qui étaient -ils et en quoi en faisait-elle parti sachant qu'il ne lui semblait pas faire parti du tout d'un groupe, d'aucun groupe, ni celui de tueurs ni même une mafia locale organisée autour d'un rythme familial : ils se sont vengés pensa t-elle mais de quoi, elle ne le savait pas, ne le soupçonnait pas et repartit hagarde en sens inverse, retraversant chacune des pièces après avoir récupéré quelque vêtements sans savoir pourquoi ni quoi en faire, ayant la surprise d'être saluée, embrassé et de comprendre des mots mais dans une langue qui n'était pas la sienne, de reconnaître enfin une partie des pièces, elle faisait parti du groupe alors, ils ressortirent tous en même temps, n'étant plus que quatre désormais, tous abattus mais vivants, un coup de vent balaya ses mèches de cheveux, elle perçu le ciel bleu et éprouvant une douceâtre envie de vomir en revoyant la scène à l'extérieur qu'elle n'avait reçue comme réelle dans un premier temps, s'étonna de se trouver en jupe qui flottait autour de son corps avec des sandales aux pieds dont elle ne comprenait même pas la présence, l'existence ou même l'achat, toujours aisée dans des déplacements qui l'amenait à chercher encore ou elle pouvait être, qui elle pouvait être, ce qu'elle était sensée faire, vers ou aller, la seule chose qui lui semblait naturelle était l'enfant dont elle ne lâchait pas la main, le traînant partout avec elle comme une habitude de toujours, regardant enfin la couleur du bitume qui devenait de plus en plus noir, elle s'évanouit en glissant lentement au sol sans plus rien percevoir.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire