vendredi 28 août 2015

Comme une aigrette qu'on aurait mise au frigo par inadvertance même plus foutue de lever une aile

Assisse sur les bords de, non, à genoux, comme une aigrette qu'on aurait mise au frigo par inadvertance même plus foutue de lever une aile, je commence à tomber, je gerbe. Environ à deux ou 3 jours d'intervalle, pendant 2 à 4 heures. Je tremble, je finis toujours par demander pardon pour tout ce que j'ai fait de mal, je recommencerais jamais, je jure devant l'éternel, vite, vite le lit, ne me dites rien, laissez-moi. Je ne peux plus me lever du lit pour attraper ce qui pourrait me calmer, à un mètre, je met 3 ou 4 heures pour arriver à faire un geste. Un peu de répit quand même de temps à autre. Mais non t'as rien ! T'as toujours été dans l’esbroufe ! Moue Dubitative. Suspicieuse. Dégoûtée. Lèvre inférieure qui mange le sol avec un petit air de te dire que tu n'es qu'une pauvre cloche, de te pousser dans les orties, que leur vie à eux ils la méritent bien et que toi tu ne vaux pas un clou, et bien, et ils ne le croient pas, évidement, ils sont pas croyants. C'est comme cela, il y a des gens incapables d'humanité tant qu'ils n'ont pas eux-mêmes expérimenté un grand malheur, (ou ceux qui n'en ont plus après en avoir expérimenté un), un bouleversement, et qui même s'ils y ont goûté, devient leur principale découverte, ils vous regardent et peuvent maintenant en parler d'un air profond, pas de vous mais d'eux, ils ont touché le fond, mais comme ils sont des gens bien, Ils savant quoi faire, eux,  ils ont eu 20 ans pour connaître un peu de lucidité mais cela ne leur vient qu'à 40 ans, et oui, ils viennent de perdre un ami, ne se souviennent plus qu'il ne trouvaient pas cela grave pour vous, c'était la vie, le jour ou cela vous est arrivé à vous, depuis, ils ont eu quelques malheurs et ils vous regardent avec l'air d'avoir compris que, ils se savent savants et ne perdront leur superbe que comme ça, parce que la vie va tellement les toucher, que, tout à coup, ils vont voir les autres un tout petit peu autrement, pas vous, vous c'est différent, eux et les autres mais seulement ceux qui en sont dignes. Car ils prennent toujours le SDF pour un malheureux qui les époumonent de terreur, alors ils votent à gauche, de quoi, on n'en sait rien, pour que depuis ce bord là rien ne se rapproche pas trop d'eux, ils crient famine quand ils reviennent du ski qui les à plombé parce que eux ne sont que les petits moyens, les riches sont vraiment des méchants : alors qu'eux ils ont leurs principes, ils ne sont pas racistes mais n'ont aucun arabes parmi leur amis, ou alors des arabes un peu distingués quoi, lettrés, qui ont fait des études comme le reste de leurs amis, à moins que celui qui n'ait pas fait d'étude se soit distingué avec un bon petit salaire, ils aiment, ou alors, ils sont gentils avec les arabes parce que les arabes sont opprimés et ils sont contre l'oppression, mais par contre s'ils ne connaissent rien à Das Kapital, ils trouvent que ceux qui se contentent d'avoir une vie minable l'ont bien voulu, ils ne savent pas qui sont ceux qu'ils jugent, mais ils en ont peur, les bateaux de migrants les affolent, ils trouvent qu'ils ont de la chance, quand même, de vivre en France, alors ils dépensent moins, de moins en moins, et commencent à se rendre compte comment la crise est dans leur porte monnaie en achetant le moins cher possible, le moins possible, surtout pour les autres, mais tout pareillement il n'y a pas beaucoup de gens qu'ils fréquentent ou dont ils s'approchent qui n'aient pas un certain niveau, ou alors ce sera pour leur donner quelque chose, sans complaisance pour leur condition, non, eux, ils ne voudraient pas, cela ne se pourrait pas pour eux, ils sont vaillants et généraux, généreux, ils éloignent d'eux la maladie en fonçant tête baissée parce qu'eux ils aiment la vie, ont peur de montrer que tout ne va pas bien, n'aiment pas la littérature un peu trash, font semblant de rire quand ils constatent qu'ils ont tord en se foutant de la gueule des autres, bien sûr ils essaient d'avoir tord eux qui ont toujours le bon point de vue, la meilleure façon d'agir, le je sais mieux que toi, je gerbe, oui mais toi, vraiment, et les voila en train de vociférer après les méchants qui volent "les places handicapé", c'est pas bien, c'est pas beau, que c'est moche ! C'est pas croyable ! Vraiment, les gens ne sont pas éduqués n'est-ce pas ? Et puis ils te regardent sans savoir ce qui se passe, en ayant toujours nié, en refusant la réalité avec tellement de maladresse et de vindicte, car vous n'êtes pas quelqu'un de bien, quelqu'un qui mérite le moins, cela les rassure de s'éloigner de vous car ils veulent briller, vivre bien, et côtoyer les bonnes gens du gotha, comme dit Houellebecq, leurs parents middle class aimaient les beaux livres recouverts en skaï, du genre la bicyclette bleue, le livre du journaliste qui à perdu sa fille d'une anorexie, ("tu as vu il a souffert", "tu l'as lu ?"), ils ne liraient pas Virginie Despentes, évidement, ça les dégoutte, ils ne liront jamais Burroughs, Albert Londres à la limite, mais ce n'est pas assez récent, ils liront du meurtres pour mémoire, Millenium, des polars, de la littérature un peu gentillette, et des très bons titres aussi, c'est vrai, Houellebecq évidemment, non, c'est trop, enfin c'est marrant finalement j'ai accepté de dormir avec Houellebecq en fait, ils n'aiment pas les gros, parce qu'être gros, c'est que tu bouffe trop, et c'est pas bien, il faut aimer la bouffe mais pas question d'être gros, ils ne savent pas ce qu'est un traumas, ils ne savent pas ce que c'est que camion qui t'explose dans la gueule à 130, c'est trop pour eux, il vaut mieux faire semblant, semblant que ce qui t'arrive n'est pas rien, je gerbe encore, ils commencent à le réaliser, je gerbe encore, mais de plus en plus élégamment, je gerbe mais moins, je me distingue nettement, maintenant, je gerbe, mais je ne l'ai jamais mis en avant, je laisse parler, je gerbe mais je ne m’arrête pas à cela, je laisse filer, je gerbe encore, je laisse médire, je gerbe, ça fait toujours très mal, je les laisse à leur mépris, je gerbe mais j'ai de la bouteille, je ne leur en veux même plus, je gerbe mais j'ai toujours tenu le coup, je gerbe mais j'ai bien fait tout ce que je pouvais pour m'adapter, je gerbe mais je ne pense plus qu'à moi, maintenant, même si chaque fois, je suis comme une aigrette qu'on aurait mise au frigo par inadvertance même plus foutue de relever une aile.


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